Bienvenue dans le meilleur des mondes «tout électrique» ! Le point de vue de Thierry TROUVÉ, Directeur Général de GRTgaz

17/07/2018

Actualité

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ll  n’y a pas que les auteurs de science fiction qui explorent le futur. Actuellement, les spéculations vont bon train pour imaginer un monde neutre en carbone à l’horizon 2050. Les discussions s’annoncent stimulantes tant certains scénarios sont parfois déconnectés du réel. Convaincus que
l’électricité sera bientôt totalement décarbonée (nucléaire et renouvelable), d’aucuns imaginent même une électrification à marche forcée des usages… un monde « tout électrique » !

Cette conception simpliste de la tran­sition énergétique qui renie les autres vecteurs énergétiques, dont les gaz renouvelables et l’hydrogène, serait une erreur à bien des égards. Aujourd’hui, dans l’industrie,  le gaz remplace avan­tageusement le charbon et le fioul pour réduire les émissions de C02•  Dans la mobilité, c’est le seul carburant alterna­tif au diesel crédible pour lutter contre la pollution et répondre aux besoins des poids lourds, des autocars et du trans­port maritime.Il n’y a pas que les auteurs de science fiction qui explorent le futur. Actuellement, les spéculations
bon  train pour  imaginer un monde neutre en carbone à l’horizon 2050. Les discussions s’annoncent stimulantes tant  certains scénarios sont  parfois déconnectés du réel. Convaincus que l’électricité sera bientôt totalement décarbonée (nucléaire et renouvela­ble), d ‘aucuns imaginent même une électrification à marche forcée des usa­ges… un monde« tout électrique>>!

Ironie de l’histoire, pour éviter le ris­que croissant de gaspillage des surplus d’électricité éolienne et solaire, les infrastructures gazières apportent une solution de stockage d’énormes quanti­tés d’énergie sur de très longues pério­des ce que les batteries ne savent  pas faire. Plus que jamais,  une transition énergétique responsable et solidaire repose sur la complémentarité des sys­tèmes électrique et gazier.

La vision d’une France « tout électri­que>> est utopique parce qu’elle repose sur des partis  pris biaisés et des paris hasardeux. Ses partisans omettent en général de préciser comment faire face aux pointes de consommation l’hiver, quand le système gazier fournit 1,5 fois plus d’énergie que le système électrique. Faudra-t-il remplacer tous les chauffa­ges au gaz par des pompes à chaleur air/ air réputées inefficaces dès que la tem­pérature extérieure se rapproche de zéro? Doubler le parc de production électrique? Développer d’autant les réseaux d’électricité à travers le pays ?

Faire fi du gaz sous prétexte qu’il est aujourd’hui encore majoritairement fossile serait une aberration.

Faire fi du gaz sous prétexte qu’il est aujourd’hui encore majoritairement fos­sile serait une aberration. Stockable et immédiatement mobilisable, les vertus de cette énergie seront décuplées avec le développement des gaz renouvelables produits sur notre sol! Une cinquantaine d’installations, essentiellement agrico­les, injectent déjà du biométhane. Selon l’Ademe, la France  pourrait satisfaire toute sa consommation avec du gaz 100% renouvelable en 2050. Cette nou­velle génération de gaz, c’est l’assurance d’un revenu complémentaire pour nos agriculteurs, de l’emploi et de l’économie circulaire dans les territoires et des importations en moins.

A supposer que cela soit technique­ ment possible, un approvisionnement exclusif à base d’électricité décarbonnée conduirait à un surcoût de l’ordre de

20 milliards d’euros/an pour la collecti­vité. A contrario, la couverture de 30% de la consommation française de gaz en 2030 avec du gaz renouvelable suppose un soutien de l’ordre de 3 milliards d’euros/an,essentiellement réinvesti dans l’économie locale. 3 milliards d’euros, un montant inférieur à la contribution des Français en 2016 pour  produire 5,5% d’électricité solaire et éolienne !

Conception conservatrice

Alors pourquoi s’obstiner à promouvoir un tel scénario ? il est vrai que, dans ce cas de figure,  l’objectif  de ramener à 50% la part d’électricité nucléaire dans notre pays paraît plus facile à atteindre… tout en maintenant le parc de réacteurs proche de ce qu’il est aujourd’hui.

Soyons sérieux, cette conception conservatrice de la transition énergéti­que ne peut justifier l’électrification de tous les usages. Soyons pragmatiques, encourageons un développement rapide des gaz renouvelables. Soyons cohérents et donnons à nos territoires les moyens de piloter un mix énergéti­que diversifié et intelligent.  Le meilleur des mondes« tout électrique>> n’est pas une option. La politique énergétique de la France mérite mieux qu’un mélange de chimères et de recettes du passé.

Thierry Trouvé est directeur général de GRTgaz