Isabelle Kocher dans China Daily : un avenir prometteur pour ENGIE en Chine
24/08/2017Actualité
[Article paru le 11 août 2017]
Mère de cinq enfants, Isabelle Kocher est la première femme Directeur Général d’une société énergétique en France et est passionnée par l’écologie.
Pour de nombreuses personnes du milieu, elle est une véritable Wonder Woman, bien qu’elle-même ne serait probablement pas d’accord avec cette description.
« L’énergie est la base de tout : de l’éducation, de la protection de la santé et du progrès économique et social », déclare Mme Kocher, Directeur Général d’ENGIE, spécialisé dans le gaz naturel, les énergies renouvelables, le digital et la production d’électricité.
L’énergie est sa passion, de même que sa famille. Elle conduit une voiture à hydrogène et dirige une organisation non gouvernementale, l’Initiative Terrawatt, pour aider les populations des villages reculés du monde entier à accéder à une électricité propre.
Elle aime aussi jouer du piano et s’entraîner avec ses enfants lorsqu’elle est à la maison, précise-t-elle.
Mais ces séances vont devoir attendre en raison de sa venue en Chine, où ENGIE vient explorer des opportunités commerciales. Le groupe international de services à l’énergie est présent dans 70 pays sur cinq continents et compte plus de 150 000 salariés.
L’an dernier, ENGIE a réalisé un chiffre d’affaires mondial de 66,6 milliards d’euros (76,7 milliards de dollars).
« La Chine est en train de prendre de l’importance pour ENGIE », a déclaré Isabelle Kocher durant un déplacement à Pékin. « Nous avons de grandes ambitions à propos de ce que nous pouvons faire avec les acteurs locaux. »
Dans un long entretien avec China Daily, elle a évoqué la vision et la stratégie du groupe européen en Chine, ainsi que sa philosophie d’entreprise et son intérêt pour la sculpture.
Comment la Chine s’intègre-t-elle dans votre stratégie d’entreprise mondiale ?
Nous sommes très enthousiastes à propos du marché chinois et nous travaillons sur de nombreux projets ici. ENGIE a décidé de concentrer l’ensemble de ses ressources, de ses investissements, de ses compétences et de son temps sur trois secteurs principaux : les énergies renouvelables, la chaîne industrielle du gaz naturel et les services d’efficacité énergétique.
Notre vision pourrait être qualifiée de 3D : décarbonée, décentralisée et digitalisée. « Décarbonée » signifie l’utilisation de l’énergie renouvelable combinée au gaz. Nous croyons que le futur reposera sur le gaz plus l’énergie renouvelable.
« Décentralisée » signifie qu’à l’avenir une bien plus grande part de l’énergie sera produite là où elle est consommée. « Digitalisée » signifie que tous les systèmes de gestion et d’exploitation à venir seront fondés sur la technologie digitale.
Cette stratégie s’est avérée positive pour les activités d’ENGIE en Chine, car elle va dans le sens de la vision énergétique du gouvernement central de bâtir un système moderne qui soit propre, sobre en carbone, sûr et efficace.
Pour mener à bien notre stratégie 3D, nous sommes en train d’investir quelque 22 milliards d’euros dans ces secteurs au niveau mondial entre 2016 et 2018. Nous sommes également en train de vendre près de 20 pour cent des actifs d’ENGIE, qui ne correspondent pas à notre vision 3D, notamment des activités charbon et pétrole.
ENGIE va-t-il augmenter son investissement et étendre sa présence en Chine ?
Nous avons l’intention d’investir environ 1 milliard d’euros en Chine dans le futur. Nous avons déjà identifié quatre secteurs clés en matière d’investissement et d’expansion.
Il s’agit des énergies renouvelables, de la mobilité verte, des réseaux de chaleur et de froid urbains et du biogaz. Je pense que l’avenir est prometteur pour ENGIE et la Chine.
Nous avons des compétences et des solutions qui ont été mises en œuvre dans de nombreux autres pays, et nous pouvons apporter cette expérience à la Chine.
Par exemple, le pays cherche à se doter de transports verts. Nous avons construit plus de 50 000 bornes de recharge pour voitures électriques dans le monde.
Nous espérons fournir ici des systèmes de recharge et de gestion des véhicules verts. La Chine est également le plus gros marché pour l’énergie solaire.
En avril, ENGIE a pris une participation de 30 pour cent dans Unisun (Groupe Energy), un développeur chinois de solaire photovoltaïque.
Nous étudions par ailleurs plusieurs autres opportunités et allons continuer à accroître les investissements sur le marché chinois. Nous nous concentrerons sur les énergies propres et renouvelables et sur les solutions digitales avec nos partenaires locaux.
Quelle sorte de défis voyez-vous ici ?
Nous avons beaucoup de possibilités et de travail avec un grand nombre de sociétés chinoises. Maintenant, le plus important est de trouver les bons partenaires et de nouer une relation de travail à grande échelle.
Quel type de rôle pensez-vous que la Chine devrait jouer pour faire face au changement climatique mondial ?
Il y a quelques semaines, 19 des pays du G20, dont les membres de l’Union européenne et la Chine, ont réaffirmé leur engagement fort envers l’« irréversible » Accord de Paris sur le climat.
D’ailleurs, la Chine est déjà un chef de file sur la question du changement climatique mondial. Le pays a fait connaître ses plans avec son objectif déclaré de juguler ses émissions de dioxyde de carbone d’ici 2030 ou avant.
Le pays souhaite également augmenter sa part de sources non fossiles dans sa consommation d’énergie primaire à 20 pour cent, tout en réduisant l’intensité de carbone de 60 à 65 pour cent par rapport aux niveaux de 2005. La Chine a la chance de disposer d’un modèle de croissance économique durable, qui bénéficiera à son peuple et deviendra un parfait exemple à suivre pour d’autres pays.
Quelles opportunités commerciales pourraient naître de l’Initiative « la Ceinture et la Route » ?
Nous avons de nombreux partenariats hors de Chine avec des sociétés nationales. Par exemple, nous travaillons au Brésil avec des acteurs chinois sur des projets d’envergure. L’Initiative « la Ceinture et la Route » peut être considérée comme un moyen de faire avancer la mondialisation et d’ouvrir les échanges.
En tant que groupe énergétique ayant une forte présence mondiale, nous suivons cette Initiative avec intérêt. Et nous serions ravis d’étudier des projets de collaboration potentielle avec des entreprises chinoises non seulement ici mais également sur des marchés tiers, qui relèvent de l’Initiative « la Ceinture et la Route ».
Depuis que vous travaillez dans le domaine de l’énergie renouvelable, avez-vous un mode de vie « vert » ?
Oui, je conduis une voiture à hydrogène en France et je suis convaincue que la technologie verte est l’avenir.
En tant que présidente de l’Initiative Terrawatt, en quoi l’énergie verte change-t-elle des vies ?
L’Initiative Terrawatt est une organisation sans but lucratif, ou une ONG, conçue pour mettre en œuvre un nouveau mix énergétique. Il existe entre un et deux milliards de personnes dans le monde qui n’ont pas accès à l’énergie. Et cela signifie qu’elles n’ont pas accès au développement, à l’éducation ou aux systèmes de santé. Aussi avons-nous mis sur pied des projets pour aider les gens à accéder à l’énergie.
Il y a par exemple des centaines de milliers de petites centrales énergétiques qui luttent financièrement, la plupart des financements allant en général aux grosses opérations. Pour les aider, nous avons créé une passerelle afin que les financiers trouvent des solutions aux problèmes de financement.
En tant que femme chef d’entreprise avec cinq enfants, comment conciliez-vous vos engagements professionnels et votre vie de famille?
La meilleure formation que j’aie eue, c’est d’avoir cinq enfants. En termes de gestion du temps, il est important de ne pas croire que vous pouvez tout faire vous-même. En tant que dirigeante, mon rôle est de comprendre ce qui se passe autour de nous et quels sont les principaux enjeux.
Il faut avoir une certaine perspective et créer les conditions adéquates pour les gens qui nous entourent, afin qu’ils puissent réussir et réaliser des choses. Je suis là pour motiver, et ensuite pour déléguer.
Vous croyez en l’égalité hommes-femmes au sein d’ENGIE. Pourquoi est-il important de diversifier le personnel ?
Du point de vue de l’efficacité, la diversité est essentielle au système interne de l’entreprise. La communauté interne à ENGIE doit refléter la communauté de nos clients ; autrement dit, elle doit être le miroir de la société.
La diversité hommes-femmes est donc essentielle, tout comme l’est la diversité générationnelle ou la diversité culturelle. Encore une fois, nous devons être le reflet de nos clients en Chine. À l’heure actuelle, un cadre supérieur sur trois recrutés par ENGIE est une femme.
Comment occupez-vous votre temps quand vous ne travaillez pas ? Avez-vous des hobbies ?
Je passe surtout du temps avec ma famille et mes enfants. J’ai également un certain nombre de hobbies. J’aime le sport et j’ai beaucoup pratiqué la natation. J’adore aussi jouer du piano. D’ailleurs, j’en joue avec mes enfants dès que j’en ai l’occasion. En outre, je m’intéresse beaucoup à la sculpture. J’essaie de visiter des expositions et des musées… Je suis fascinée par la sculpture.
Retrouvez l’interview d’Isabelle Kocher sur le site de China Daily (en anglais)